Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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différentes sur le passé, avec des vœux peut-être différens pour l'avenir : ils avaient alors des intérêts et des ennemis communs,

Autour de Billaud-Varennes , de Collot-d'Herbois , de Barrère, de Cambon , d’Amar, de Vadier, se rangeaient tous ceux qui avaient la. conscience , non le remords de leurs crimes , et quelques hommes d’un instinct moins sanguinaire, mais d’un fanatisme sombre. Ils étaient soutenus plus faiblement par des députés qui croyaient leur être redevables de leur existence.

Voilà quels étaient les élémens de la convention dans la situation nouvelle où un effort tardif de courage l'avait enfin amenée. »

Les deux partis s’observèrent pendant quelque temps. Les dominateurs du comité ne furent pas renversés, mais éconduits du pouvoir dictatorial. D'abord on leur donna pour collégues , au comité de salut public, six de leurs rivaux. On jes soumit à un renouvellement par le sort; et le sort les chassa. Il en fut de même pour le comité de süreté générale. Les instrumens de la tyrannie ne furent pas déplacés, mais abattus. On cassa sans indignation, sans coère , sans menace, le tribunal révolutionnaire, on en remplaça les membres. Billaud avait encore proposé de conserver les fonctions d’accusateur public à Fouquier-Thinville, à ce monstre qui ne fut surpassé en férocité que par Billaud lui-même. L’horreur d’un tel choix révolta l’assemblée. Les jurés du nouveau tribunal prononcèrent à-peu-près autant d’absolutions que de jugemens. Ils commirent cependant un assassinat qui leur fut ordonné. Un citoyen très-obscur fut condamné à mort pour le crime imaginaire de fédéralisme : c'était’ une atroce combinaison pour tenir dans l'oppression et le silence le parti de la Gironde. Pendant les quinze premiers jours qui suivirent le 9 thermidor , les

risons de Paris furent ouvertes à un grand nombre de détenus. Il y en eut qui reçurent leur liberté le jour même où ils devaient subir la mort. Ainsi, à ces portes fatales, sans cesse barricadées par ces chars qu'on appelait des bières roulantes, se tenaient maintenant des familles heureuses , qui attendaient et qui recevaient dans leurs bras ceux qu’elles avaient crus à jamais perdus pour elles. La multitude venait jouir de ces doux spectacles. Mais, un peu plus loin, la troupe des délateurs frémissait, se communiquait de pressantes alarmes , allait les reporter à ses chefs, tenait conseil avec eux. La convention était obsédée de leurs cris, et le silence farouche de plusieurs députés exprimait tout autant de terreur et de rage. Un d’eux éclata

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