Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

LE COMTE DE PROVENCE ET MADAME DE BALBI. 209

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— Je voudrais bien savoir qui aurait osé vous donner raison », réplique Mme de Balbi avec emportement.

D’Avaray ne se déconcerte pas et, comprenant qu'il ne peut plus reculer :

« C'est Monsieur, fait-il en se tournant vers lui.

« Un volcan, un tourbillon de flammes, la tempête et la foudre ne sont pas plus violents et plus destructeurs. Les tables, les chaises, le bonnet, tout dans la chambre vole et se disperse. En vain, l'auditoire effrayé cherche à résister au torrent.

« Des chevaux, des chevaux, je veux m'en aller! s’écrie-t-elle en courant comme une insensée; je ne supporterai pas un pareil affront.

« Le danger élait manifeste; c'était rester sur la mine après avoir mis le feu aux poudres. Chacun se retire à petit bruit et moi tout le premier; je gagne la porte et me sauve. »

Une situation aussi tendue ne pouvait se prolonger. Des amis s’entremirent et, avec eux, Monsieur sans doute. D'Avaray fut ramené chez Mme de Balbi. On obligea les deux adversaires à s'embrasser. Mais la réconciliation ne fut qu'apparente. La favorite n'était pas femme à pardonner à celui

qui l’avait mise dans son tort. Elle feignit cepen14