Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

Quoi qu'il puisse arriver, Genève est déjà une ville absolument nouvelle, qui repose sur le sol de l’ancienne : elle ne présente plus que le spectacle du pillage, de la désolation et de tous les crimes révolutionnaires. Voilà cependant, Monsieur, ce qu'un pas vers la nouvelle doctrine a pu faire en si peu de temps, d’une peuplade qui, dans le cours des dissensions les plus actives, avait toujours conservé le respect des propriétés, et l'horreur de l’effusion du sang.

Comment rendre compte d’une dégénération aussi complète, et cependant si rapide, dans l'esprit public d’un peuple sage, froid, moral et accoutumé depuis longlemps aux jouissances de la liberté, ainsi qu’à ses débats? Comment ce même peuple, qui, dix-huit mois auparavant, venait de signaler son patriotisme de manière à s’attirer l'attention de toute l’Europe, a-t-il pu tout-à-coup résigner à l'influence française ses antiques lois, qui avaient jusque-là survécu à tant de passions et à tant de chocs, loutes ses affections, toute sa moralilé, et cet esprit public qui avait fait considérer sa patrié comme un séminaire de talents et de vertus?..….. Sans doute, l’un des premiers devoirs de l’historien des Révolutions de Genève sera, en écrivant celle-ci, de chercher à tracer la source et les progrès de cette inconcevable dégénération. Je me bornerai à imputer surtout cette dégénération à l'institution la plus désorganisatrice de la révolution française ; celle qui aitacha finalement la responsabilité où n'était plus le pouvoir, en faisant tomber peu à peu le pouvoir là où n’était pas la responsabilité.

Cicéron attribuail la longue existence de la République Romaine à l'institution même des Tribuns, qui semblè-