Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

SOMOET

que lorsqu'il eut déjà réussi à faire succéder à notre assemblée générale et non délibérante, une assemblée partielle et délibérante, dont chaque arrêté (la plupart pris par acclamation) était une espèce d'ordre au Gouvernement ou à la Convention d'adopter ou de rétracter telle ou telle mesure. Si l'exécution de cet arrêté devenait funeste, l’orateur qui l’avait proposé dans le Club en était quitte pour rentrer dans la foule, tandis que le Gouvernement qui avait été obligé d'y souscrire en conservait toute la responsabilité.

Lassés d’un rôle passif et humiliant, les membres de ce gouvernement, du moins ceux qui regrettaient le plus le crédit populaire qui leur échappait, tentèrent enfin de prendre les rênes de ce club qui avait déjà pris les rênes de l'État; mais lorsqu'ils essayèrent de monter sur ce nouveau théâtre, les premières places y étaient prises, ou l'esprit y était déjà tellement perverti, qu'ils ne purent s’y faire écouter qu’en y déclamant eux-mêmes à l’envi contre le modérantisme du Gouvernement ou de la Convention. Bientôt ils s’y surpassèrent les uns les autres, en y jetant en avant les propositions les plus extravaganies, en semant de sourdes alarmes sur les projets de l’aristocratie qu’il fallait surveiller, disaient-ils, et en proposant des innovations, qui, à les entendre, devaient ramener l’âge d’or dans Genève.

De cette nouvelle espèce de clubocratie organisée dans la démocratie même, et où malheureusement les jeunes gens non majeurs réussirent pour la première fois à prendre place, résulta en définitive l'habitude de l’oisiveté, un grand surcroit de misère, une continuation d'ivresse de parti, et une instabilité universelle dans tous