Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

EPOGE.

les principes moraux et politiques. L'ardeur plus active des jeunes gens ne tarda pas à leur donner un ascendant marqué sur les personnes d’un âge mür; et comme l'esprit de parti leur fournit mille prétextes pour braver l'autorité paternelle, ce tribunal domestique des mœurs, qui aurait pu suppléer en quelque manière à la décadence des lois, s’écroula avec elles. Pour comble de maux, l'influence de ce club fut si universelle et si destructive, que dès qu’on mit en action la nouvelle institution des jurés, il ne s’en trouva pas un seul qui osât déclarer aucun des membres du club coupable d’un délit quelconque, quelque constaté qu'il fût, et quelque importance que püt mettre l'Administration à en poursuivre le châtiment. Il était d'autant plus aisé de comprendre que l'impunité des petits crimes en provoquerait inévitablement de plus grands, que le club central triomphait de cette impunité même, et qu'il tombait peu à peu exclusivement dans les mains d’un petit nombre d’orateurs actifs, en sous-ordre, chargés de deites, et qui ne s’effaçaient les uns les autres que par la violence de leurs motions.

Telles étaient les dernières rivalités de cette assemblée, lorsque Bousquet comprit à Paris qu’elle était mûre pour l'adoption de ses grands projets, et qu'il lui serait aisé d'y dominer tous ses rivaux, par l’audace et l’atrocité même de la conspiration qu'il y proposerait. On à vu qu'il eut soin cependant d'y préparer les esprits, en faisant accuser ses victimes d’une conspiration contre-révolutionnaire, dont il s’engagea .à donner des preuves en temps et lieu, et qu’alors, sous prétexte de devancer cette conspiration , il réussit à y faire adopter la sienne, c’est-à-dire à renverser l'État sans retour.