Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

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10 décembre, il annonçait au ban‘ Sokcévic qu’il tenait à sa disposition une somme de cinquante mille florins (plus de cent mille francs) comme première mise de fonds.

En 1867, il fut assez heureux pour pouvoir procéder en personne à l'ouverture de cette Académie dont l’empereur-roi l'avait nommé protecteur et dont son ami, le docte chanoine Raëki, fut le premier président. J’ai eu, sur une aimable invitation du prélat, la bonne fortune d'assister à la cérémonie et je l’ai racontée en des pages auxquelles je ne puis que renvoyer. J'ai dit plus haut quelle bienveillance l’évèque tenait à témoigner aux Serbes orthodoxes, et comme il s’appliquait à ne pas les distinguer des catho-

liques dans la répartition de ses libéralités. Le premier

secrétaire perpétuel de l’Académie fut un savant philogogue serbe, Georges Danicitch. Il y a, juste au moment où j'écris ces lignes, quarante ans que l’Académie a fait paraître son premier volume. Depuis ce temps-là, elle a publié environ cent quatre-vingts volumes de Mémoires ; vingt et un volumes des Anciens auteurs croates; plus de trente volumes de Documents relatifs à l’histoire et à la littérature ; trente volumes de Monumenta spectantia historiam Slavorum meridionalium ; dix volumes de Monumenta historico-juridica ; une dizaine de volumes relatifs au folk-lore des Slaves méridionaux ; un certain nombre d'ouvrages isolés, dont quelques-uns fort importants : par exemple, ceux du professeur Bogisich sur le droit coutumier, des annuaires, etc... Elle a entrepris en outre la publication d’un grand dictionnaire serbo-croate commencé par feu Danicitch, continué par M. Budmanni, qui forme déjà cinq volumes et qui est arrivé à la lettre L. Ce sera l’un des plus beaux monuments lexicographiques du monde slave. On ne peut regretter qu’une chose, c’est que parfois l’Académie se soit laissée entrainer par l’excès de son patriotisme, qu’elle ait, par exemple, édité des recueils de textes latins, pour la plupart relatifs à l’histoire de l'Italie ou des peuples balkaniques, en les

1. Le ban est une sorte de vice-roi, chef du pouvoir exécutif en Croatie.