Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LE CENTENAIRE DE LA LITTÉRATURE BULGARE 175

chez les Slaves balkaniques que peut l’être chez nous celui d’un Bossuet ou d’un Fénelon.

Il naquit en 1739 à Kotel (en ture Kazan), dans la Bulgarie méridionale’. Cette ville a donné à la Bulgarie moderne quelques-uns de ses hommes les plus remarquables : les deux Vogoridi, dont l’un fut prince de Samos et l’autre, sous le nom d’Aleko Pacha, le premier gouverneur de la Roumélie orientale, absorbée depuis 1885 dans la principauté de Bulgarie; Georges Rakovski, mort en 1868, agitateur politique et publiciste distingué ; Gabriel Krstievitch, qui fut, après Aleko Pacha, gouverneur de cette Roumélie éphémère ; le moine Néophyte Borelli qui, le premier essaya d'organiser une église nationale bulgare et mourut en 1849, emprisonné au mont Athos ;le médecin Beron, mort en 1871 en Roumanie, qui publia en 1824 à Brasov, en Transylvanie, le premier livre d'école bulgare. Au témoignage de M. Jireczek*, on montrait encore, il y a une trentaine d’années, à Kotel, deux maisons qui avaient servi d'habitation au jeune Sofroni ou plutôt Stoïko. Car il ne prit le nom de Sofroni que lorsqu'il entra dans l’église. Chez les orthodoxes, le nom ecclésiastique commence en général par la même lettre que le nom laïque. C’est ainsi qu’au 1x° siècle le grand apôtre des Slaves, qui s'appelait Constantin, avait pris le nom de Cyrille sous lequel il devait s’immortaliser.

Le père de Stoïko eut la bonne idée d’envoyer son fils à l’école : dans ce temps-là il n’y avait pas d’écoles bulgares. Le jeune élève dut étudier le grec et apprit par cœur l’oct toic*. Au moment où il'commencçait le psautier, il se trouva orphelin. \

Il se mit à gagner sa vie comme il put, fut envoyé à Constantinople pour régler les affaires d’un oncle défunt. Dans cette capitale, il lui arriva toute espèce d’aventures désa-

1. Kazan veut dire, en ture, bassin vallée. Kotel est la traduction bulgare du mot ture.

2. Konst. Jireczek, Voyages en Bulgarie. Prague, 1888 (en langue tchèque).

3. Recueil de chants religieux, ainsi nommé parce qu’il est écrit pour huit VOIx.