Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LE CENTENAIRE DE LA LITTÉRATURE BULGARE 181

ont été jusqu'aux oreilles du pieux empereur Alexandre Pavylovitch. Il a eu pitié de vous et a désiré vous dérober à ces cruels tourments. Informez-vous et vous saurez s'il y a dans d’autres empires de pareils tourments. Vos souffrances ont été connues de toute l'Europe et dans toutes les gazettes on a écrit sur votre martyre. Aussi votre cœur pourra-t-il avoir l'idée de se tourner vers vos ennemis et cruels tourmenteurs? Fuyez-les, chers chrétiens, comme on fuit un serpent cruel et venimeux, accourez vers cette pieuse armée russe et entrez en relations avec elle. Considérez les Russes comme des frères de votre sang; servezles avec fidélité et affection : recevez-les dans vos maisons; traitez-les bien et, s'ils veulent aller quelque part, indiquez-leur le chemin bien exactement, sans perfidie.

Mais surtout, chrétiens, gardez-vous de la trahison de Judas

comme du feu de l'enfer. Qu'aucun chrétien ne tombe dans ce grave péché, car il serait puni dans ce monde et dans l'autre, parce qu'il a livré son âme à l'ennemi des chrétiens. Ainsi, si vous servez fidèlement, nous espérons en la volonté de Dieu que dans peu de temps vous aurez joie et bonheur, que vous vivrez en paix et en tranquillité, ce que nous vous souhaitons à tous. Amen.

Nous avons encore un autre document signé de Sofroni pendant son séjour en Valachie : c’est une lettre adressée par cinq notables bulgares de Bucarest — dont il est — à un de leurs compatriotes qui avait rendu des services aux Russes pendant la campagne. Cette lettre est datée du 2 août 1819.

À partir de cette date on perd le trace de Sofroni. On ignore quand il est mort, où repose sa dépouille, et le patriote bulgare ne sait où porter l'hommage que sa piété voudrait rendre au fondateur de.la littérature nationale.

Revenons un peu sur le livre qui lui a valu cet honneur. Cet ouvrage n’a pas la prétention d’être original. Nous en avons cité plus haut le titre. Nous avons vu qu'il est simplement traduit du slavon et de la très profonde langue grecque. I n’était pas facile de trouver un éditeur à Bucarest pour un livre destiné aux voisins de Bulgarie, et les modestes ressources de Sofroni ne lui permettaient pas. de