Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

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désormais assurées. La princesse Marie-Louise — j'ai eu l'honneur de l’approcher — était une femme de grand sens et de grand cœur, et sa mort prématurée — elle est décédée en 1899 — a laissé de profonds regrets au cœur de ceux qui l'ont connue.

Conformément aux engagements pris par le Sobranie, Le prince Boris avait été élevé dans la religion catholique. La Russie ne désarmait pas, toute l’Europe imitait son exemple et persistait à ne pas reconnaître le prince Ferdinand. On connait le joli mot du duc d’Aumale. Le prince Ferdinand venait souventen France dans un incognito qu'il devait subir plutôt qu’il ne le recherchait.

Un soir, il pénètre dans cette bibliotèque de Chantilly où son oncle, tout en fumant sa vieille pipe de bruyère, se livrait à ses travaux favoris. La bibliothèque n’était plus éclairée que par la lampe qui brülait sur la table studieuse. — Qui est là ? demanda le duc.

— C'est moi, mon oncle, votre neveu Ferdinand.

_— Ah! c’est toi, mon ami. Tiens! Je faisais comme l’Europe; je ne te reconnaissais pas.

Si l'Europe, sans s'inquiéter de la Russie, s'était décidée à reconnaitre l’ordre de choses établi en Bulgarie depuis déjà dix ans, le peuple bulgare et son prince auraient pu prendre patience.

Mais, à la longue, l'isolement où les cabinets européens laissaient la Bulgarie finissait par lui peser. Il n'existait qu'un seul moyen de sortir de l'impasse où l’on se trouvait acculé. C'était de convertir l'héritier présomptif à l’orthodoxie. Le jour où le prince Ferdinand prit cette résolution qui dut coûter à son cœur d’époux et de père, l’empereur de Russie annonça qu'il serait le parrain du jeune néophyte ; le prince Ferdinand fut reconnu, non seulement par la Russie mais par tous les États européens, y compris la République française qui allait bientôt proclamer la séparation de l'Église et de l’État, et par la Turquie musulmane .