Souvenirs de Russie 1783-1798 : extraits de journal de Mme Leinhardt

24 J. CART

volonté de cette même Catherine devenue impératrice. Le règne de ce prince ne fut qu'une longue anarchie, pendant laquelle les Russes intervinrent constamment dans les affaires du royaume, Stanislas ne s'opposa pas même aux divers démembrements de son pays, et il finit par abdiquer en 1795 pour finir ses jours à Saint-Pétersbourg en 1798.

Catherine Il, se dirigeant vers la Crimée, devait se rencontrer avec Stanislas. Cette entrevue qui était, malgré les apparences, un acte d'humilité de la part du roi, eut lieu le 25 avril (vieux style). À onze heures du matin, ce jour-là, toute la Cour, bien parée, se rendit à bord de la galère de Sa Majesté nommée le Dnieper, qui se trouvait ancrée vis-à-vis de Konielf, où le roi l'attendait. Et ici, laissons la parole à M'e L. : « Quand tout le monde fut assemblé, le comte Betzharadin, grand maître de la Cour, et le prince Bariatinski, maréchal de la Cour, se mirent dans une chaloupe avec leur suite pour aller quérir le dit Seigneur-Roi qui, incontinent, fut amené au son des trompettes et au bruit des canons de la flotte. L'illustre Catherine le reçut très gracieusement et le fit entrer dans son cabinet où il n'y avait que son premier ministre, le prince Potemkin, surnommé le Taurien. La conférence dura environ cinq minutes ; après quoi les portes du sanctuaire s’ouvrirent et bientôt après on vit paraître la comtesse de Mniszech, nièce du roi de Pologne, que l'oncle présenta à l’Impératrice : puis les comtesses Branitzka et Skavronska, nièces du prince Potemkin, furent présentées par lui au Roi. Ensuite l'illustre Catherine présenta de même ses demoiselles d'honneur de Prattenolf et de Czernichelf (fille du comte) au Roi qui causa beaucoup avec la dernière, lui demanda des nouvelles de son père qui, ces jours-là, était encore tristement couché dans sa galère (il avait appris la mort de sa fille cadette), sur sa chaise longue où ses douleurs de rhumatisme le retenaient. Bientot après, il fallut encore se remettre en chaloupe pour se rendre à la galère qui sert de salle à manger. Au milieu du diner, l'Impératrice se leva avec toute sa suite pour boire à la santé du roi de Pologne qui, quelques minutes après, fit la même chose. Ces santés respectives furent accompagnées de tout le bruit de l'artillerie. Après le diner, le Roi se retira pour quelques heures sur la galère du prince Potemkin, son vassal, qui lui avait fait préparer un appartement où il reçut la Cour et les compliments de toute la suite, J'ai appelé le prince son vassal,