Souvenirs de Russie 1783-1798 : extraits de journal de Mme Leinhardt

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ils ne laissent rien à désirer dans leur société. Le général Stedingk (?), qui est venu complimenter l’Impératrice sur la paix, est encore ici avec plusieurs gentilshommes de sa suite. Parmi eux se trouve un comte de la Gardie, favori du roi, et un baron de Staël, neveu du gendre de M. Necker. »

Malgré la paix et la satisfaction mutuelle des anciens ennemis, il semble qu'il y ait eu alors un moment critique et des points noirs à l'horizon. À la date du 10 janvier 1791, M'e L. écrit : « Nous préparons 36 vaisseaux de ligne pour être en état de répondre aux malveillants ; 310 pièces de gros canons ont été déjà transportées à Riga et toute la Livonie fourmille de troupes. Nous sommes préparés à tout. Mais, malgré cela, il est bien fâcheux d’avoir encore la guerre en vue, lorsqu'à peine on a célébré la paix. » Heureusement que les craintes ne tardèrent pas à être dissipées. La Suède allait, du reste, bientôt passer par une crise intérieure d’une réelle gravité. Nous en parlerons iéi pour ne pas trop couper les récits contenus dans le jour-

nal de Mike L.

À la date du 5 avril 1792, M! L. écrit : « Le roi de Suède a été dangereusement blessé le 17 mars, à un bal masqué, d’un coup de pistolet au côté. On le transporta dans une salle à côté de celle du bal, où il fut pansé. On dit qu'après le pansement il demanda qu’on fit venir auprès de lui ses propres ministres et tous les ministres étrangers, et qu'il leur dit : « Je vous ai fait venir, Messieurs, pour vous faire voir l’état où je suis ; c’est la cause de tous les rois! » L'assassin est arrêté ; c'est un gentilhomme suédois, et trois autres aussi; il y a quarante conjurés. L'assassin a dit qu'il savait qu'il méritait la mort, mais qu'il avait cru servir sa patrie. »

Devant ses ministres et les ministres étrangers, Gustave III fit une courte apologie de son règne en ajoutant qu'il avait toujours ardemment désiré le bien de ses sujets, que, s’il avait manqué quelquefois dans les moyens qu'il avait employés, c'était le partage de l'humanité de se tromper, que sa conscience ne lui reprochait rien et qu'il voyait la mort d'un œil tranquille.

A Ja date du 15, M! L. écrit : « Malgré les espérances qu'on avait conçues sur l’état du roi de Suède, il vient de terminer sa carrière.