Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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route ; c’est ainsi que nous arrivàmes , avec une peine infinie, au haut de cet affreux coupe-gorge. À peine y étions-nous parvenus, que nous entendimes des cris effroyables, le hurrah des Cosaques, en un mot! Nous les vimes devancer de quelques minutes l'artillerie russe, après avoir écharpé nos braves camarades. Puis nous entendîmes l'artillerie tonner à travers cette immense cohue d'hommes et de chevaux. Il est impossible de se faire une idée de cette scène de carnage et de destruction.

Que de braves sans défense ont été immolés dans cette épouvantable boucherie, et quand je pense que j'ai échappé de quelques minutes avec mes excellents camarades, je ne puis m’'empêcher de croire que la divine Providence veillait sur nous.

Nous marchâmes encore quelque temps, et nous nous arrêtimes dans un bivouac, où nous préparâmes de nouveau notre soupe, puis nous allâmes coucher à six lieues de là, où j'eus l’inexprimable bonheur de retrouver mon frère, que je n’avais plus revu depuis l’affaire de la BéréSina. Le lendemain, lorsque nous voulûmes nous