Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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versa dans un fossé, d’où ni mon frère ni le conducteur ne purent me retirer. Ce ne fut qu'après une heure d'efforts et de prières inutiles adressées aux passants, qu’un grenadier de la garde impériale se décida à me tirer de ce mauvais pas, et encore ne le fit-il qu'après avoir reçu cinq francs pour sa peine et m'avoir fait entendre que, sans son bon cœur, j'aurais bien pu rester longtemps encore dans mon fossé! Il avait raison.

Enfin, lorsque je fus remis sur la grand’route, je sentis que mes pieds et mes mains commençaient à geler. Je remis alors ce que je possédais à mon frère ; le tout montait à quarante francs ; puis je l’envoyai, vers les 9 heures du matin, dans un village, pour me chercher de l’eau dans une gourde : la fièvre me donnait une soif dévorante. Il prit alors les devants, car la route était de nouveau tellement encombrée, qu'avec le traîneau mon guide ne pouvait plus avancer. Pour parer à cet encombrement, il se décida à descendre sur le Niémen, qui était gelé. Nous y étions depuis quelques instants seulement, lorsque notre traîneau s’engagea dans un autre traîneau, aussi pris par les glaces. Mon conducteur, malgré ma défense, me mit tout simplement sur le traîneau aban-