Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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et mes jambes enveloppées dans de vieux linges, aussi propres que possible, je m’endormis du sommeil de l’infortune, lorsque je fus reveillé en sursaut par mon Polonais. Je lui demandai ce qu’il avait, el il me répondit, avee beaucoup de bonhomie, si j'avais besoin de quelque chose. Lorsque le jour parut, je le vis arriver d'un air désespéré; il m’annonça que, pendant la nuit, on lui avait volé son cheval.

Quant à moi, je ne savais trop que penser de sa perte, car, ayant sondé le fond de mon gousset, je n’y retrouvai plus ma montre. Je commençai donc à douter de l'aventure et de l'intérêt tout nouveau de mon lancier. Il m'avait tout l'air de jouer la comédie. C'était là un nouveau contre-temps, auquel je ne m'attendais pas. J’engageai tout de suite mon sergent à chercher un traipeau; mais tout fut inutile: je ne retrouvai ni mon frère, nimes camarades, ni aucun véhicule. Désespéré, je ne voyais d'autre ressource que d’aller à l'hôpital, pour devenir prisonnier des Russes. C’était là une triste résolution, et je n'avais plus que quelques heures avant d’être à la merci des Cosaques. Décidé à en finir, je me faisais conduire à l'hôpital, lorsqu’en sortant de