Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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change que nous avions faite ne fut point à notre avantage, aussi, vers les dix heures du matin, fûmes-nous obligés de nous arrêter et d'entrer chez un curé de village pour obtenir quelques vivres. Nous continuàmes notre route jusqu’à la nuit. Notre cheval ne pouvait plus avancer, et nous étions encore à près de deux heures d’un premier village, pour trouver un gite.

Dans notre perplexité, les uns opinaient pour se séparer, d’autres pour attendre. Ce dernier parti, c'était la mort parla gelée! Le froid devenait toujours plus intense. Nous en étions là, lorsque nous entendîmes dans le lointain le trot de deux chevaux. Mes gaillards, munis de leurs fusils, comprirent d’abord qu'il fallait s'emparer des chevaux de gré ou de force. Ge qui fut dit fut exécuté. Nous vimes approcher deux domestiques, conduisant chacun un cheval en très bon état. Mes deux camarades les arrêtèrent avec le fusil sur la gorge, et, comme rien n’est plus éloquent qu’une démonstration pareille, nous fimes atteler ces deux chevaux à notre char; à quoi ils se prétèrent de très bonne grâce; ma haridelle fut ainsi dignement remplacée, et nous arrivèmes heureusement dans un village nommé Lastein.