Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France
Partis pour la seconde fois, le 14 janvier 1809, de Lisbonne, nous entrâmes à Quiberon le 21 du même mois. Arrivé à Saintes, le 16 février, j’écrivis à ma mère la lettre suivante, que je me décide à transcrire ici, parce qu’elle contient quelques détails relatifs à notre séjour à bord des navires anglais, détails que je n’ai pas encore fait connaître. Je viens, ma chère mère, de vous exposer la situation générale de notre bataillon, mais je veux aussi vous parler un peu de ce que j'ai fait pendant ces jours d’épreuve.
Rien n’eüt été plus facile aux Anglais que de profiter des vents favorables pour nous ramener en France, comme ils l'avaient déjà fait pour les quatre cinquièmes de l’armée, mais en nous retenant, sans motif plausible, à Lisbonne, ils voulaient, je crois, provoquer la désertion générale de nos hommes.
Notre existence à bord des navires était.insupportable. Des rations insuffisantes nous forçaient à acheter des vivres des Portugais à des prix exorbitants : une tête de choux, par exemple, qu’on nous vendait 10 sous, en valait tout au plus 2; le vin qui valait 4 sous nous était vendu 42. En un