Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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douleurs, et ne trouvant auprès de nous que quelques aliments pour les empêcher de mourir de faim. Dès ce jour, nous commencâmes à comprendre dans quel abîme de misère nous pouvions nous trouver. Jusqu’alors nous n’avions manqué de rien. Nous avions des vêtements chauds et en bon état ; nos chaussures étaient neuves. Notre division avait trouvé un convoi considérable de vêtements, à destination d’un corps polonais qui n’était plus là. Pour ce qui me concernait particulièrement, j'étais à une journée de Polotsk, lorsque mon chien découvrit, près d’un vieux château, une vaste cachette, remplie de bons vétements de laine, de vivres et de liqueurs de toute espèce. Mon chien d'arrêt était un précieux animal. Je me souviens, et il y a longtemps de cela, qu'il s'arrêta court devant un monceau de branches coupées ; j'avais beau l’appeler, il ne voulait pas en démordre ; enfin au mot : cherche! il se mit à gratter la terre. Mon domestique m’accompagnait, et, en creusant un peu, nous découvrimes des caisses d'excellents vêtements d’hiver, des provisions de bouche, et tout cela à quelque distance du bivouac. Nous refermämes la cachette, car, dans ce moment , nous ne savions pas trop