Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

> THEVENEAU DE MORANDE.

prochain par une sorte de prédication littéraire dont la violence s'allie, tant bien que mal, avec la moralité des intentions. A côté des orateurs de la chaire chrétienne, qui recommencent éternellement leur platonique effort pour convertir l'humanité pécheresse, il y a des peintres cyniques qui se soucient médiocrement de la morale, nous donnent, sans passion comme sans colère, la photographie, pour ainsi dire, des lèpres hideuses, des maladies inavouables de la société où ils vivent, et tracent pour les races futures la biographie psychologique de leurs contemporains.

L’antiquité païenne est fertile en écrivains de cet ordre. Suétone nous raconte les turpitudes des existences impériales, sans que sa plume révèle une émotion indignée. En dévoilant le secret des mœurs éhontées de son temps, Pétrone, le voluptueux auteur du Satyricon, « ce livre charmant et terrible, cette œuvre de démon », comme disait Sainte-Beuve, n’a pas d'autre but, semble-t-il, que celui d'offrir un régal de haut goût au palais blasé des lecteurs sceptiques. Et Lucien! avec sa grâce délicate et son ironie spirituelle, avec le prestige de son style et les dons exquis de l'imagination la plus souple qui fut jamais, est-il autre chose en définitive qu'un commis-voyageur en rhé-