Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

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thrope avec une verve déconcertante, traitant les ministres de #”0n cher ami et ne voyant dans l'aventure qu’un commerce lucratif, qu’il gère, d’ailleurs, avec une habileté consommée. Entre ces deux hommes il n’y a qu’un point commun, c’est le mépris que, dès la première heure, ils éprouvent l’un pour l’autre !.

Lalligand est le type achevé de ces personnages louches pour qui la Révolution fut une carrière : chassé de la gendarmerie après un an de service pour avoir mis en circulation de fausses lettres de change, il fit peu à peu tous les métiers, s'établit marchand de bois, joua du violon dans un théâtre, — c'est là sans doute qu'il se lia avec Fabre, — fut condamné à quinze ans de fer comme faux monnayeur, — nous aurons à revenir sur ce péché de jeunesse, — s’évada de la prison d’Autun, passa en Savoie, d’où il fut expulsé pour crime de rapt, rentra en France dès le début

1. Voici l'opinion de Chévetel sur Lalligand : « Cet homme, que je n'ai jamais vu que quatre à cinq fois, n’était nullement ce qu'on annonce. Il avait servi sous l’ancien régime dans la gendarmerie d'où il fut renvoyé: il fit ensuite tous les métiers: dans une descente qui se fit chez lui (à Autun), on trouva quelques centaines de faux louis avec un balancier et tous les instruments nécessaires à cette fabrication... La première fois que je l'ai vu, il était dans la misère, et, avant qu'il eut obtenu une gratification de la Convention, et lors de son premier retour de Bretagne, Isabeau et moi le trouvèrent un jour chez lui, au milieu des préparatifs d'un somptueux festin: l’opulence avait fait place à la pénurie. » — Récit de Chévetel.