Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

188 LE MARQUIS DE LA ROUËRIE

parlé ? Nous n'avons, pour le juger, que son propre témoignage : même vu à travers les euphémismes dont il enveloppe sa narration, Chévetel fait horreur.

C’est donc son récit, qu'à défaut d'autre, nous devrons suivre en le contrôlant à l'aide du rapport que, dès son retour, il adressa au ministre Garat. Si ce rapprochement ne nous apprend pas toute la vérité, du moins nous en saurons assez pour juger l'homme en toute conscience, puisque c'est lui-même qui s’accuse et se cloue au pilori !.

1. Il est utile de joindre à notre récit le texte même du Tapport de Chévetel. Cette pièce se trouve aux Archives nationales, carton W, 274.

« Paris, 24 janvier 1793. « Moxsteur,

« Le citoyen Morillon vous ayant rendu compte de la situation de la Bretagne et des motifs qui m'avaient déterminé à entreprendre le voyage que je viens de faire, il me reste à vous Communiquer par écrit, comme vous l'avez désiré, les éclaircissements que je me suis procuré tant sur l'affaire de Bretagne que sur les plans combinés des ennemis tant intérieurs qu'extérieurs…. « Mon Séjour à Jersey me donna le loisir d'observer ce qu'on avait à craindre des habitants et des émigrés qui y sont réfugiés: Les prêtres y sont nombreux et ont conservé leur influence sur les paysans de Bretagne. À Saint-Hélier et à Saint-Aubin, il y en à environ 1.200. Ils catéchisent les matelots et pêcheurs qui abordent dans l'ile et les chargent de paquets et de morales chrétiennes pour porter à leurs anciennes ouailles.

« Les conseillers, les présidents du ci-devant Parlement de Bretagne, beaucoup de ci-devant privilégiés de cette province, de celle du Maine, du Perche, de Normandie, de l'Anjou, de la Touraine, forment la seconde classe, à la tête de laquelle se trouve l'ancien P. G.S. des états de Bretagne, le sieur de Bothrel; il est leur agent avoué auprès du chef de la conjuration de Bretagne