Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

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rai arracher ces papiers, je serai censé n'avoir cédé qu'à la violence, et Burthe ne manquera pas de jurer qu'il a vu toute une armée...

Cette fois encore les pauvres femmes ne comprirent pas : l'idée qu'un fonctionnaire pût forfaire à son devoir, quel qu'il fût, était sans doute trop étrangère à leur habitude d'esprit : elles ne virent dans la proposition de Lalligand qu'un moyen de joindre à ses prisonniers les quelques hommes d'action dont il les invitait à mettre le dévouement à contribution, et elles dédaignèrent de répondre.

Elles avaient, d'ailleurs, d’autres pensées : elles se sentaient dans la main de Dieu et se disposaient à mourir. Lalligand ne leur avait pas caché que bientôt elles seraient transférées à Paris : connaissant par oui-dire le régime des prisons du tribunal révolutionnaire, elles voulaient mettre à profit leur séjour dans les cachots de Rennes, ville où elles comptaient de nombreuses relations, pour se préparer pieusement à la mort. Dès qu'elles furent écrouées à la Tour-le-Bat, une amie leur BE savoir que, dans une cellule séparée seulement de la leur par une porte lourde et massive, était enfermé un vieux et respectable prêtre réfractaire. Les dames Desilles reçurent cet avis comme une grâce du ciel: elles parvinrent à se mettre en rapport avec cel ecclésiastique ; puis, comme aux jours des persécutions antiques, une fille de la Cha-