Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

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salle où délibéraient les municipaux ; devant ces magistrats débraillés, pris de vin, insolents, « troupe immonde qui tenait à la fois du bourreau, du laquais et du parvenu !,» les Bretons subirent un interrogatoire, et la municipalité décida que, « pour satisfaire au désir du peuple, on allait les promener dans Versailles ». Les malheureux, certains que leur dernière heure était venue, durent se soumettre à cette ignoble parade. Chacune des dames fut obligée de prendre le bras d’un municipal, paré de ses insignes; les hommes parurent enchaïînés, accompagnés chacun d'un gardien? chargé de le tenir en laisse. Un grand nombre de fonctionnaires, d'officiers même, vinrent grossir le cortège, qui, pendant plusieurs heures, parcourut les avenues et les places de Versailles sous un déluge de menaces et d’injures obscènes. A la tombée de la nuit, on conduisit les prisonniers à la VieilleGeôle* ; hommes et femmes furent entassés dans le même cachot, où ils espéraient, du moins, prendre un peu de repos ; mais point: ils enten-

1. Journal de Rennes, 1841, d'après les souvenirs de la famille Desilles.

2. Au cours de cette promenade, l'homme qui accompagnait M. de la Guyomarais, lui proposa de le faire échapper à la faveur du tumulte et du désordre de la foule. Le gentilhomme refusa, ne voulant pas se sauver sans sa femme et ses enfants. — Renseignement communiqué par M": de la Guyomarais.

3. À l’angle de la rue de la Pompe et de la rue de la VieilleGeôle .