Un diplomate d'il y a cent ans : Frédéric de Gentz (1764-1832)
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contre les Bourbons. À ses yeux, quinze ans de domination pesaient autant qu'une dynastie vieille de huit cents ans. Le grand avantage qu'avait Napoléon, c'était d’être empereur en 1814.
Si Gentz tient à un tel point compte de faits, c’est à cause de la nature même de la politique. Les faits restent son domaine, son objet propre. Supprimer arbitrairement un fait quelconque, c’est supprimer arbitrairement une des données du problème. Aussi Gentz, dans la Réfutation de Makintosh, en arrive-t-il à ce principe : en politique il ne faut provoquer de changement que quand une modification de l’état de choses existant est reconnue indispensable?. Cependant, c’est toujours la raison qui a à juger que telle réforme est ou non indispensable. Ainsi, bien loin de se défier d’elle, Gentz en fait un arbitre suprême. Et s’il est porté à s’en servir moins fréquemment, il donne à ces consultations une plus grande rigueur. Il est en effet beaucoup moins malaisé de montrer qu’une chose est utile que de prouver qu’elle est indispensable. Tout en ce monde peut avoir son utilité. Au contraire, avant d'affirmer qu'une mesure est indispensable, il faut faire l'épreuve et la contre-épreuve. Par conséquent, en
1. Mais c’est la raison qui aura à résoudre le problème, 2. Werke. Ed. Weick. II, p. 155,