Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

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toire. L'assistance nombreuse et fort mélangée a entendu, sans y comprendre plus que moi, la lecture de mémoires traitant de l’importance et des progrès des arts mécaniques. Le débit monotone et la prononciation défectueuse des lecteurs, joints à un bruit continuel, ont dû contribuer beaucoup à mon impression maussade.

J'ai assisté avec plus d'intérêt au service célébré à Saint-Sulpice pour les funérailles de l'acteur Molé (1). Il y avait foule, et le convoi a été suivi par un grand nombre de membres de l’Institut, de savants et d’artistes. Rœderer écrit à ce propos, dans le Journal de Paris — sa remarque est caractéristique : — « L'église de Saint-Sulpice offrait le spectacle le plus attendrissant : la religion, la philosophie et les arts étaient réunis pour rendre les derniers honneurs à l'artiste célèbre que la France regrettera longtemps. »

Sur les billets d'invitation aux obsèques, le défunt est qualifié : Doyen des artistes du Théâtre-Français. Sa mort est une perte sensible pour la scène où il était le seul représentant des traditions de la haute comédie. Monvel, qui a prononcé le discours d'adieu à la barrière menant à Antony, où Molé a été enterré dans sa petite propriété, est assurément un vétéran très estimable des Français. Mais son âge et la chute de ses dents lui ont enlevé une partie de ses moyens; il n’a d’ailleurs jamais eu, dans la tragédie, la situation exceptionnelle que Molé s'était faite dans la comédie. Qui n’a pas vu Molé dans ses rôles d'homme du monde ou de petit-maître, ne peut avoir l’idée de la façon dont il s’incarnait dans son personnage

sciences et des arts séant à l’Oratoire, actuellement temple réformé, rue Saint-Honoré, près du Louvre.

(4) Molé est mort le 41 décembre 1802, en son domicile, rue Corneille, n° 4, paroisse de Saint-Sulpice.