Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

SOUS LE CONSULAT. 175 été si fausse et si mal accentuée que je ne comprends pas comment cet acteur a jamais pu passer pour un bon tragédien. Talma n'aurait pas dû accepter son rôle de « gouverneur de la ville (1) » ; il l’a complètement manqué, et Mme Talma (2), dont le ton et les manières ont un charme mélancolique que je ne conteste pas, n’a pas mieux compris le sien. Si Mlle Volnais n'avait été trop perpétuellement larmoyante, c’est elle, à mon gré, qui eût mérité le plus d’éloges. |

On a acclamé quelques vers dirigés contre les prêtres et l'esclavage :

Ce n’est que devant Dieu qu'on doit être à genoux.

Ce Dieu vous a-t-il dit : Je veux être vengé? Pourquoi punissez-vous avant qu'il ait jugé?

et encore :

Dieu créa les mortels pour s'aimer, pour s'unir. Les cloîtres, les cachots, ne sont pas son ouvrage; Dieu fit la liberté, l'homme a fait l'esclavage.

Au surplus, le publie s’est montré bon prince; il s’est donné le plaisir d’applaudir, sans y regarder de trop près, vers et acteurs.

Du drame sentimental que vous n'aimez pas plus que moi, je passe — le contraste fera transition — à une bonne vieille « farce » française. Je vous présente le joyeux Arlequin, tenant ses assises au Théâtre des jeunes artistes (3).

(4) Le drame se déroule dans la ville de Cambrai.

(2) Caroline Vanhove, bonne actrice, que Talma avait épousée, le 26 juin 1802, après avoir divorcé, le 6 février 4801, avec Julie Carreau, aimable personne qui n'avait que le tort d'être sensiblement plus âgée que le tragédien.

(3) Le petit Théâtre des jeunes artistes avait son entrée rue de