Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

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de tout gouvernement qui les laisse conduire à leur guise leurs petites affaires.

Au surplus, que m'importent les Parisiens? C’est ce que je me dis fréquemment depuis mon arrivée, comme je me le suis répété cent fois au cours de la Révolution. Les arts et les trésors artistiques, voilà ce qui m'intéresse à Paris! Parlons done du Musée des monuments français. organisé dans un ancien couvent, rue des Petits-Augustins. C’est M. Lenoir qui a eu l’heureuse pensée, au commencement de la Révolution, de former une collection des monuments intéressant l’histoire de l’art national, qui étaient éparpillés sur toute l'étendue du territoire et menacés de destruction. Malheureusement l'installation de son musée est loin d’être terminée; le gouvernement semble lui porter peu d'intérêt; c’est à peine si jai compté une douzaine de maçons travaillant aux aménagements intérieurs. Les fonds dont dispose M. Lenoir (1) sont si restreints, qu'il ne lui est pas possible de pousser les travaux avec régularité.

En pénétrant dans la salle principale, on aperçoit une

(1) Alexandre Lenoir avait ouvert son musée en 1793; sa nomination comme administrateur datait de 1800. Attaché par deux actes, du 12 avril 1790 et du 4 juillet 1791, à la Commission des monuments et au Comité d'aliénation, et investi d'une mission spéciale à l'effet de rassembler les monuments artistiques menacés de pillage ou de destruction dans les édifices religieux devenus « chose publique », Lenoir s'était acquitté de cette tâche avec un zèle et un courage remarquables. La collection disposée dans la fondation de Marguerite de Valois était bien son œuvre.

Les travaux d'installation intérieure étaient à peu près terminés à la fin de l'Empire, quand le Musée fut supprimé (1816), pour faire place au Palais des Beaux-Arts, dont les travaux commencés en 1820 n'ont été terminés qu'en 1861, par l'habile architecte Duban. De l'ancien monastère des Petits-Augustins, la chapelle seule, où se voit la belle copie du Jugement dernier de Michel-Ange par Sigalon, a échappé au marteau des démolisseurs et reconstructeurs.