Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

SOUS LE CONSULAT. 195

disparaît; Laïs le chante avec son style ample et large, sa voix pleine et sonore, sans se permettre le moindre mouvement rapide. Il se conforme trop servilement aux intentions du maladroit librettiste.

La mise en scène elle-même laisse à désirer, malgré tout le bruit qu’on en fait. Quelques Berlinois, au milieu desquels je me trouvais à cette représentation, et qui ont vu la pièce au Théâtre national de Berlin, ont été complètement de mon avis.

Il y a cependant, dans les Mystères d’Isis de Morel, un de ces intermèdes charmants que l’on ne peut trouver que sur la scène du Grand Opéra. Laïs-Papagéno, devenu le noble berger (!) Bocchoris, chante, devant le temple du Sphinx, une jolie romance qui doit persuader au prêtre et aux gardiens de l’édifice sacré de rendre la liberté à Pamina prisonnière. |

Peu à peu son chant impressionne les douze Maures qui veillent sur le temple : insensiblement ils se mettent à exécuter autour de lui une pantomime exprimant d’une façon comique et originale leur curiosité, leur plaisir, leur étonnement. En même temps, se fait entendre très piano un chœur d’autres gardiens du temple :

O divine mélodie! Que tes effets sont puissants!

Par tes doux enchantements Notre âme est malgré nous ravie.

La belle voix de Laïs, qui continue à chanter, se détache admirablement sur le chœur; celle de Pamina s'y marie, et les Maures fascinés finissent par tomber aux pieds de Bocchoris en formant des groupes pittoresques. Il n’est pas possible de voir un tableau mieux composé ni exécuté avec plus de fini. Gardel a vraiment une aptitude spéciale pour régler ces sortes d’intermèdes. Et comme il les tire