Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

SOUS LE CONSULAT. 297

bles chacun dans son genre, ne transforment en bonne affaire la belle invention de Herhan.

Pendant toute la journée du premier de l’an, Paris n’a cessé d’être sillonné par des gens à pied ou en voiture, courant porter leurs cartes et leurs vœux. Les exclamations, les rires qui s’envolaient de certains grands véhicules, bondés d'individus en toilette, me donnaient lieu de penser que ces sectateurs de l’antique Januarius ne perdaient pas leur temps à gémir sur la corvée du jour. Et en effet, tandis que je regardais passer une de ces voitures devant la Maison des Languedociens, — mon logis actuel, — l’hôtesse m’apprit que les jeunes gens ont coutume de s'associer par six ou huit pour louer un vaste carrosse. Ils le garnissent de flacons, de comestibles, et, pendant qu'un domestique de louage dépose les cartes aux portes des protecteurs, chefs et collègues, les esclaves de l'étiquette consomment gaiement leurs provisions en narguant le froid et l'ennui. Il paraît que l’on est devenu singulièrement « petite ville » à Paris, à l'égard de cette sotte formalité des cartes ; elle s'impose méme, dit-on, aux étrangers qui ont été présentés. Pour moi, qui ne m'y suis jamais soumis dans mon pays, je m’en dispense ici, Installé au coin de mon feu, à l'abri du tapage et des roues des fiacres, je me suis amusé à parcourir un certain nombre de ces productions, plus ou moins littéraires, que fait éclore partout le retour de janvier. Parmi ces actualités assez banales, je ne citerai qu’un article du Journal de Paris, la feuille à la mode; elle doit sa vogue, non certes à sa partie politique et économique, vraiment misérable, mais à ses Variétés littéraires ou humoristiques. J’extrais quelques passages caractéristiques du courant de l'opinion et du goût régnant :

« Les étrennes d’un journaliste ne sont pas agréables ;