Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

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italiens; mais dans Proserpine, comme du reste dans ses dernières œuvres, tous les personnages, Pluton, Jupiter, Proserpine, chantent dans un style identique; il y à même un joli duo dans lequel Pluton et Proserpine se répondent en chantant les mêmes motifs, sans que l'accompagnement instrumental lui-même soit modifié d’une note pour l’une des parties; ce duo est d’ailleurs une réminiscence de Nina. Sans la première scène du deuxième acte, dans laquelle Cérès et ses nymphes sont à la recherche de Proserpine, scène d’un grand effet scénique que Mme Armand et les chœurs ont bien rendue, on croirait que Paisiello ignore la révolution opérée par Gluck dans l'opéra français. Le reste de la partition est en effet écrit du ton uni, facile, sans caractère, qu'ont adopté les ltaliens modernes. Nulle part le séduisant côté mélodique du maitre n’est mis en relief; le système prosodique français l’a évidemment gêné. Et au lieu d’interpréter sa musique avec cette grâce légère qui prête souvent tant de charme aux moindres traits dits par un Italien, les chanteurs de l'Opéra l’accentuent par une diction qui lui est absolument contraire.

Le soleil donne le signal de l’éclosion des modes d'été; on ne rencontre que des femmes en cheveux, la tête bizarrement « accommodée » par le coiffeur : sur la nuque et derrière les oreilles, les cheveux sont tondus comme au rasoir; au sommet du crâne, de longues mèches relevées en pyramide se rabattent vers le front. Cette coilfure étrange paraît l'invention d’un coiffeur qui a voulu rendre son ministère indispensable aux dames, pour un temps prolongé; elle n’a certainement pas été imaginée par une Française sachant ce qui lui sied.

Le turban est détrôné par des chapeaux ronds en basin blanc, ou par des chapeaux de paille à larges bords