Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

80 UN HIVER A PARIS

minutieux scrutin pour l'élection d'un commissaire administrateur et d’un membre non résidant.

Au début de la réunion, on avait distribué une brochure de Larive (1), l'ancien tragédien des Français. Elle a pour titre : Moyens de régénérer les théâtres et pour objet de démontrer qu'il ne faut admettre sur la scène que des acteurs « vertueux », des pièces « vertueuses », et que l’on devrait organiser pour le théâtre une administration générale, comme celle des Postes ou des Forêts. L’auteur exclut la danse de l'éducation artistique; en revanche, il veut que l’on enseigne l’escrime, l’histoire et la géographie.

J'ai fait une remarque amusante à propos de cette brochure : Larive Fa déjà présentée, il y a deux ans, au théophilanthrope La Revellière-Lépeaux, directeur à l’époque, simple membre de l’Institut actuellement. Dans son énumération des auteurs dramatiques, le nom de Voltaire avait alors été omis par Larive : les exemplaires distribués aujourd’hui contiennent le nom tnterpolé à la main. L’opuscule ne brille, d’ailleurs, ni par le jugement, ni par le sentiment, ni par l'esprit. Je comprends, à cette heure, pourquoi Larive ne m'a jamais satisfait complètement dans ses meilleurs rôles.

L’exclusion de la danse sur le programme de l’ex-tragédien m'a particulièrement frappé, parce que j'ai eu l’occasion de faire, il y a peu de temps, une observation curieuse à cet égard. Dans une grande ville d'Allemagne, deux troupes jouaient simultanément le répertoire fran-

(4) Stylé par Mile Clairon, Mauduit de Larive avait tenu, pendant dix ans, avec une supériorité incontestée, l'emploi de Lekain: les succès du novateur Talma hâtêrent sa retraite. Il vivait à Montlignon près Montmorency, ayant échangé «l’habit romain» contre l'écharpe municipale.