Une mission en Vendée, 1793

vi NOTE PRÉLIMINAIRE.

se pénètrent point. La philosophie révolutionnaire trouve à la vérité, dans les grands centres, un terrain bien préparé; mais les paysans sont encore ce qu'ils étaient au moyen âge : entre eux et les citadins, il y a un abîme de quatre ou cinq siècles. Ces hommes qui vivent à la même époque ne sont pas du même temps, et leur antagonisme éclate. La distinction qu'on cherche à établir entre le fanatisme et l’esprit religieux est trop subtile pour les masses. Les Conventionnels se heurtent à une foi irraisonnée et intransigeante, qu’exaspère encore la brutalité systématique des agents royalistes au service de Carrier.

Ce n’est d’ailleurs qu’assez longtemps après le commencement de la guerre que la question religieuse est soulevée. Au début, les Vendéens ne se battent ni pour leur Dieu ni pour leur Roi. Ils se révoltent seulement contre la Patrie : ils ne veulent pas de la conscription. C’est pour n'être pas soldats qu'ils font la guerre. Pitre-Chevallier, M®° de la Bouere, Mwe de La Rochejacquelein en conviennent. L'idée de défendre la royauté et la religion n’apparaît que plus tard, quand les nobles et les prêtres insermentés ont, plutôt de force que de gré, pris la tête du mouvement. L’émeute grâce à eux change de caractère: elle devient la contre-Révolution.

La question financière n’est pas moins délicate que la question religieuse. Manquant d'argent, ne pouvant faire accepter les assignats, les commissaires de la Convention lèvent des contributions en nature. On verra plus loin le

curieux arrêté par lequel on ordonne à tout citoyen pro- #

priétaire de deux paires de souliers d’en offrir une aux armées républicaines. Ces sorles de réquisitions ne sont pas toujours obéies. Beaucoup de communes, comme beaucoup de citoyens, dissimulent leurs approvisionnements. Elles refusent de livrer leurs grains, leurs farines, leurs cartouches, leur bétaïl, etc., même en cas de besoin pressant. Il faut user de menaces et parfois recourir à la force pour les contraindre. Sans l'énergie des représentants du pouvoir central, elles laisseraient les armées ou les villes voisines mourir de faim. Ru