Vergniaud : 1753-1793

— 65 aussi l'émotion de Vergniaud, à la vue de ce frais visage d'enfant lui rappelant tout son passé, tout ce qu’il avait aimé et qu'il ne devait plus revoir! Mais on n'avait guèse le temps alors de se laisser aller aux souvenirs et aux attendrissements, et c'est au moment même où Vergniaud causait avec le fils de sa sœur qu'on apprit à la Force la condamnation de Custine. « Les services rendus à la patrie ne sont plus comptés dirent les détenus, nous subirons le même sort. »

En effet, le 27 octobre, les Girondins comparurent devant le Tribunal révolutionaire. Hermann, l’ami de Robespierre, qui venait, quelques jours auparavant, de prononcer la sentence de mort contre MarieAntoinette, présidait. Le procès, conduit par cet homme, ne fut qu’une formalité pour arriver à tuer. Les accusateurs furent entendus comme témoins: aucun avocat ne se présenta, et la plupart des accusés ne purent parler. Vergniaud, interpellé, avait réussi un instant à se faire écouter. Parlant de ses amis, il avait dit : « Ma consolation et leur crime, c’est de m'aimer »; parlant ensuite de son dévouement au pays, de ses sacrifices, il s'était écrié : « Que faut-il faire encore pour consolider la République par l'exemple du plus énergique de ses enfants? Mourir ? Je le ferai. » Charles Nodier, dans ses Souvenirs de la Révolution française a senti à ce mot admirable l'émotion le gagner et il a dit : « Ici l’éloquence est portée à son plus haut degré, parce qu’elle est nonseulement dans la parole, mais dans la vie de l’homme qui parle, et si cela n'est pas sublime, la notion du sublime ne m'arrivera jamais. »

Aussi, les membres du Tribunal révolutionnaire avaient tressailli, la foule avait été remuée, la condamnation ne paraissait plus certaine. Alors, on

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