Éloge de Vergniaud : discours de rentrée prononcé à l'ouverture des conférences de l'ordre des avocats de Bordeaux, le 4 janvier 1875
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de penser que le temps qu'il regrette n’a pas été stérile pour la culture de son esprit et la solidité de son talent.
De dures épreuves allaient commencer pour Vergniaud : il avait secoué un joug qui lui pesait, il avait oublié celui de la pauvreté, qu'il ne devait pas tarder à subir. Pendant plusieurs années, toutefois, nous le voyons se livrer avec ardeur à ses goûts littéraires, reçu chez l’auteur des Éloges, Thomas, l'ami de tous les amis de Turgot, rencontrant dans ses salons les écrivains les plus distingués d’une époque qui en compte tant, se laissant emporter par le mouvement philosophique qui entraîne tout, faisant avec facilité des vers applaudis. Mais, au milieu de cette existence brillante, le besoin se faisait parfois cruellement sentir : n'ayant que peu de bien à attendre de sa mère, et de son père que
_de sévères conseils, qui ne lui étaient point épargnés, Vergniaud avait recours à la bourse de M. Alluaud, son beaufrère (1), dont la générosité ne se lassa jamais. Il avait rencontré chez Thomas un protecteur qu’il ne cherchait guère : c'était un directeur des Vingtièmes, quelque chose comme un directeur des Contributions. M. d’Aïlly s'intéressa à lui, devina sa misère, et lui offrit un contrôle. C'était un maigre Fe pour notre auteur : force lui était bien pourtant de s’en contenter. Encore lui fallut-il longtemps
l’attendre : les titulaires tenaient bon. Écoutez ce qu'il écrivait, à la fin de novembre 1778, à M. Alluaud : « M. d’Ailly m'a dit qu'il n’en était pas encore mort, mais de prendre patience : que nous étions dans un mois de gelée, et qu'il en partirait assurément quelqu'un (2). »
Enfin, il obtint sa place! Mais, hélas! pourquoi fallait-il «un calculateur? » Il rimait, je le crains, plus qu'il ne contrôlait; et vous supposez bien qu'il ne fallut pas la gelée pour lui faire quitter les Vingtièmes.
(4) Alors ingénieur-géographe du Roi à Limoges (2) Vatel, lettre n° 2, p. 16.