Cour d'appel de Lyon. Procès-verbal de l'audience solennelle de rentrée le 4 Novembre 1873. Camille Jordan

33 débordement d'une réaction violente qui ne pouvait durer et, comme il l'a dit lui-même, il lui fallait un effort pour s'ébranler du sein d'une longue retraite qu'embellissaient pour lui toutes les affections domestiques. Deux politiques se trouvaient alors en présence : d’une part, les ulra-royalistes, animés d’une haine farouche contre la Révolution dont ils avaient tant souffert, se présentaient comme des justiciers implacables, décidés à détruire tout ce qui venait d'elle, à châtier tous ceux qui avaient pris part à ses excès, et à arracher de notre histoire cette page sanglante. Ils semblaient rêver le rétablissement de la monarchie telle qu’elle existait avant 1789, s'appuyant sur le clergé et la noblesse rentrés en possession de leurs biens. Parfaitement honnêtes, mais absolument inexpérimentés, ils se laissaient entraîner par des passions qu'avait surexcitées le spectacle de la criminelle folie des Cent jours et qui ne s'étaient pas tempérées encore par l'habitude de la vie publique.

D'autre part, les Consriturionnels, non moins attachés à la dynastie, non moins indignés des crimes de la Révolution, estimaient qu'il était nécessaire de tenir compte des idées et des intérêts qu'elle avait fait naître, et qu'il est impossible de refouler toute une nation vers son passé. À leurs yeux, cette prodigieuse convulsion qui avait bouleversé tout le pays n’était pas un accident; elle avait sa raison dans des vices de nos institutions ou de notre société ancienne, qu'il fallait rechercher et corriger, pour éviter à l'avenir Le retour de pareils maux.