Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

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-rien de l’hornme d'Etat véritable, c’est-à-dire du citoyen qui, sincère, probe, inébranlable, plein de génie, doué par naissance et préparé par éducation, saisit fortement et de haut les obligations contingentes, le devoir, et se

-voue corps et âme, jusqu'à la mort, à la tâche que le développement de la civilisation impose aux meilleurs et aux plus forts, dans une société en transformation,

Or, revenons à l’histoire.

On ne saurait en douter, de tous les politiques de son temps, Danton est celui qui comprit le plus vite et le mieux (de primesaut, on peut dire) les impossibilités de la guerre de propagande et la nécessité d’éluder, dans l'application, des conceptions subjectives aussi absolues que celles de la métaphysique révolutionnaire, et de subordonner leurs déductions, presque toujours utopiques, à la réalité, aux conditions pratiques des choses, aux nécessités des situations.

Faut-il s’en étonner ?

Doué d'un sentiment social ardent, d’un génie politique vigoureux, compréhensif et créateur, d'un caractère hautement énergique, il avait été appelé par sa profes-

sion à des occupations élevées, embrassant toutes les faces de la haute administration. De plus, il s'était luimême solidement instruit, [lappartenait, en philosophie, à l’école encyclopédique : jurisprudence, économie politique, politique proprement dite, histoire, langues vivantes, rien ne lui était étranger de ce qui est nécessaire à un homme public (4). Ainsi né et préparé, il était mür, à trente ans; des événements inouïs, auxquels il eut

-tant de part, vinrent tirer de sa puissante nature tout ce qu'elle était capable de donner.

C’est alors et ainsi qu'il devint, en quelques mois, le politique admirable qui mena la Révolution pendant sa période la plus périlleuse et la plus féconde.

On n’a à lui reprocher que le manque de personnalité, d’ambition, qui lui fit commettre sa plus irrémédiable

(1) V. notre mémoire sur la vie privée du conventionnel, Paris, 1865; et Les Kleuthéromanes, in-32, Paris, 1884,