Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

208 DANTON ÉMIGRÉ.

Nous vous l’avouons: nous avions cru longtemps que Louis XVI voulait sincèrement l'établissement de votre Constitution. Ses promesses réitérées de fidélité, ses proclamations, ses réponses aux députations, qui étaient la plupart consignées dans les papiers publics, nous avaient presque persuadés qu'il était de bonne foi. Mais depuis l’époque du 10 août, nous sommes désabusés. Toutes les machinations de la cour, qui sont maintenant dévoilées, nous ont ouvert les yeux. Sa correspondance et celle de la reiné avec les chefs de Coblentz; l'usage qu'il faisait de la liste civile pour entretenir les gardes du corps, les mousquetaires, les chevau-légers et autres compagnies armées, qui font aujourd’hui la guerre à la France, et pour faire imprimer des pamphlets et des libelles contre l'Assemblée nationale et tous les vrais amis de la liberté; la perfidie et la corruption de ses ministres et le renvoi de ceux qui marchaient franchement dans le sens de la Constitution : tout cela, messieurs, nous convainet qu'il était un traître.

La Constitution le plaçait sur le plus beau trône du monde, lui assurait vingt-quatre millions de revenu pour sa dépense, lui donnait un degré d'autorité suffisant, puisque, indépendamment de toutes les places, dans l’ordre civil et militaire, qu'il pouvait donner à ses créatures, il pouvait encore faire mouvoir une armée de deux cent mille hommes.

Et de qui tenait-il tant de bienfaits? D'une nation aimante et généreuse !

Ne pouvait-il donc pas être heureux ? Oui, sans doute; mais il a voulu être despote ; et le voilà précipité du faite des grandeurs dans la classe des simples particuliers : heureux s’il sait, Comme Denys de Syracuse, s'y procurer quelque ressource.

On dira, nous le savons, que la nation française est ingrate, puisqu'elle lui doit la convocation des états généraux, qui à été le premier échelon de la liberté.

Louis XVL en convoquant les états généraux à retiré une nation de labime, et c'est là une action estimable. Mais, en détruisant ce qu'ils ont fait, il l'y a reprécipilée, et c'est une perfidie épouvantable.

Que dirait-on d’un homme, en apparence compatissant, qui relirerait son semblable d'un précipice, et qui, après l'avoir élevé jusqu'à lui, l'y ferait tomber de nouveau? Cet homme serait un monstre.

Nous approuvons donc, messieurs, le parti que vous venez de prendre d’abolir la royauté en France.

Méprisez les clameurs de ceux qui vous diront que la France est trop grande pour former une république, et que ce genre de gouvernement ne convient point aux Français. La République