Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
DEPUIS LA MORT DE MAZARIN JUSQU'À L'ÉDIT DE TOLÉRANCE 7
rions laflirmer, à voir avec quelle obstination il a poursuivi de ses sarcasmes les ministres du culte catholique. Or la tolérance de Voltaire provenait moins du respect de la conscience religieuse que d’un sentiment très vif d'humanité et d’une forte prévention à l'égard de tous les cultes. On a déjà signalé sa protestation contre le fanatisme persécuteur dans « la Ligue » (ou la Henriade) et ses déclarations sur la tolérance dans le « Fanatisme » où « Mahomet ».
Il ne se contenta pas d'écrire de beaux vers, mais il intervint courageusement en faveur des protestants opprimés. On sait quelle campagne infatigable il mena pendant plusieurs années pour faire reviser le procès de Calas, puis celui de Sirven et celui du chevalier de la Barre. Il vaut la peine de lire la correspondance qu'il échangea à ce sujet. Et quelle joie, quand le succès couronna ses démarches! « Adorons ensemble « la Providence, écrit-il, qui daigne tirer un bien d’un mal « si horrible et qui pourra faire succéder la tolérance à cet « esprit de fureur, qui a si longtemps régné parmi les « hommes !. »
C'est alors qu'il écrivit ce « Traité de la tolérance » (1764) qu'il avait annoncé à Moultou, dans sa lettre de mai 1752 et qui mériterait d'être introduit comme un classique dans nos bibliothèques populaires. Après avoir rappelé les bûchers ordonnés par la Chambre ardente sous Henri IE, le massacre de Vassy, la Saint-Barthélemy, etc..…., il demande: «Il y « a des gens qui prétendent que l'humanité, l'indulgence et « la liberté de conscience sont des choses horribles, mais, « en bonne foi, auraient-elles produit des calamités compa« rables? »
L'homme qui, après Voltaire, contribua le plus à populariser la tolérance au xvm siècle, fut Marmontel. Reprenant les thèses de Voltaire et de Rousseau, à savoir: qu'il faut laisser à Dieu le soin de venger les injures faites à la religion
1. V. Lettres inédites sur la tolérance, recueillies par Ath. Coquerel fils, Paris, 1863.