Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
80 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE
prenait la résolution de déclarer non recevable quiconque attaquait la légitimité d'enfants nés de mariages protestants et en 1769 le Parlement de Toulouse lui-même validait un mariage sur le vu d’un certificat du pasteur Rabaut. Ce fut au sujet de cette question des mariages, que quelques jurisconsultes de l’école de d’Aguesseau intervinrent pour montrer ce qu'il y avait d’inique à dénier l'état civil à tout protestant, qui refuserait de se confesser et de se marier devant un prêtre catholique.
Vers 1751-52, Joly de Fleury (G uillaume-François), d’une célèbre famille de robe, qui succéda à d’Aguesseau (Henri) comme procureur au Parlement de Paris (1717-46), rédigea sur la même question un Mémoire pour le Conseil du Roï (1352)'. Il y exposait la situation des religionnaires depuis 1688. Les enfants protestants pouvaient être baptisés par les curés, puisque les Réformés admettaïent la validité du baptême catholique ; quant au mariage, il demandait qu'on dispensät les époux protestants des épreuves exigées d'ordinaire.
Ripert de Monclar, trois ans après, fit un grand pas vers la solution de la question, par la publication de son Mémoire théologique et politique sur les mariages clandestins, ete. (1755). Nous avons analysé plus haut ses arguments en faveur de la tolérance, il nous reste à indiquer ici ses con clusions relatives au mariage des dissidents : € Si l’on n’y « prend garde, ditl, le royaume va être inondé de bâtards. « Il faut donc aviser à la situation. Le Roi est le maître d’éta« blir, sans l'intervention de l'Église, une forme légitime « pour les mariages de ses sujets protestants et de valider « ceux qui sont déjà faits. »
Gilbert de Voisins, avocat général au Parlement de Paris, élargit la question des mariages protestants dans deux Meémotres sur les moyens de donner aux protestants un élal civil en France (1767). I s'y préoccupait de donner satis-
r. Le rapport de Joly de Fleury a été inséré par Malesherbes dans son er Mémoire sur le mariage des protestants (Londres, 1788).