Histoire de la théophilanthropie : étude historique et critique : suivi d'une notice sur les catholiques allemands
102 LES CATHOLIQUES ALLEMANDS
Jean Ronge, d’abord curé à Grotkau, en Silésie, avait été suspendu de ses fonctions à la suite de publications libérales qui avaient déplu à ses supérieurs. Le 14 octobre 1844, dans un article d’une revue de Saxe (Sächsische Vaterlands blater), il s’éleva avec indignation contre le scandale donné au monde chrétien par l’évêque de Trèves, Arnoldi, qui avait exposé à l’adoration des catholiques la prétendue robe sans couture de JésusChrist. Ronge offrait un contraste frappant avec le vicaire Czerski : caractère ardent, esprit indépendant, individualité tapageuse, tempérament révolutionnaire : un Lamennais allemand, avec le génie de moins. Il donna une grande extension au mouvement catholique allemand, mais en le faisant entrer dans une voie plus politique que religieuse.
Ses attaques contre le culte des reliques et les supercheries coupables dont il était la cause, lui valurent une grande popularité, que l’excommuniation solennelle’ lancée contre lui par le chapitre de Breslau vint accroître encore. Les adresses, les dons affluaient de toutes parts. L'Allemagne catholique tout entière était ébranlée, et l’on put se croire un instant à la veille d’une nouvelle réforme de l’Église. Des communautés catholiques allemandes se formèrent à Breslau, à Leipzig, Elberfeld, Worms, Berlin, Dresde. La petite communauté apostolique-catholique de Schneïdemühl, Czerski à sa tête, se laissa entrainer dans le courant. Le 23 mars 1845, la nouvelle Église convoqua à Leipzig un concile où se rendirent les représentants de vingt communautés catholiques allemandes. Dans ce concile, les délibérations furent menées avec une telle rapidité que Ronge et Czerski eux-mêmes arrivèrent tout juste à temps pour en entendre la fin. Avec Kerbler, le prédicateur de la communauté de Leipzig, ils étaient les seuls ecclésiastiques de l'assemblée. Ce synode vint révéler les divergences profondes qui séparaient les éléments si disparates de l’Église naissante. Une scission fut sur le point d’éclater entre la communauté de Schneidemübl, que suivaient celles de Berlin et d'Elberfeld, et la majorité, dirigée par Ronge et les représentants de Breslau. On parvint cependant à se mettre d'accord, et
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