Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

6 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

« La Touraine est appelée avec raison le jardin de la France ; la Loire en arrose les campagnes, qui offrent les aspects les plus diversifiés et les plus agréables que l’on puisse imaginer, encore les avons-nous traversées dans une saison qui ne leur était guère favorable. Nous soupâmes à Tours; ensuite nous fûmes voir la ville ; il y a une superbe rue, fort longue, où il y a des trottoirs, ainsi que sur le pont, qui est très beau ; mais l'hiver dernier les glaces en abattirent cinq arches; il y en avait douze ; on a remplacé celles qui manquaient par un pont de bois.

« Nous dinâmes à Blois; j'y vis la salle des États sous Henri III et celle où fut poignardé le duc de Guise.

« Le pont de Blois est encore plus beau que celui de Tours. L'accent est en effet excellent dans cette contrée, mais après les louanges qu'on m'avait faites du langage, je fus fort étonné d'entendre plusieurs barbarismes choquants ; il est vrai que c'était parmi le menu peuple.

« Je ne te dirai rien d'Orléans, sice n’est que je fus voir la statue de la Pucelle, qui ne répond nullement à la renommée de Jeanne d'Arc. »

Fort heureusement nos voyageurs ont trouvé des compagnons de route agréables: M. de Lostalot, député par les communes du Béarn et qui porte à Paris l'adhésion de sa province aux décrets de l’Assemblée nationale; c'est un homme « plaisant, bon patriote et plein d'esprit » ; M. d'Argenton, « jeune