L'Autriche et la Hongrie de demain les différentes nationalités d'après les langues parlées : avec de nombreux tableaux statistiqes et 6 cartes ethniqes
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La statue, élevée à Prague en l’honneur de Jungmann, montre que les Tchèques n’ont point oublié qu’il fut l’un des plus vaillants à la tête du groupe grandissant des patriotes, qui s’efforçaient d’éveiller la conscience nationale du peuple et préparèrent le mouvement de 1848. Ils se rappellent que ce noble vétéran des luttes héroïques guida les premiers pas de K.-J. Saffarik, de François Palacky, qu’il encouragea le jeune Slovaque Jean Kollar et François Ladislas Celakovsky.
La Renaissance tchèque fut conduite, on le voit, par des savants et des hommes de lettres qui basèrent le renouveau de leur patrie sur la résurrection de leur langue nationale, par opposition avec l'allemand, que leurs oppresseurs voulaient leur imposer. De là cette tactique qui étonne au premier abord, mais qui, au fond, est, au contraire, absolument géniale et fut absolument efficace. Vers 1850, une société se constitua sous la présidence de Rieger, dans le but de construire un grand théâtre national de la langue tchèque. Les promoteurs se proposaient surtout de faire entendre au peuple des œuvres littéraires purement tchèques dans sa langue maternelle, qui commençait à ne plus être parlée que dans les villages reculés où l’allemand n’avait pas pu pénétrer. Une souscription publique fut donc ouverte pour construire un théâtre à Prague. Les plus pauvres d’entre les paysans comprirent l'intérêt patriotique d’une telle création et apportèrent leur obole à la souscription. C’est donc, à juste titre, que linscription suivante fut placée sur le fronton du théâtre : « Le peuple à lui-même. » |
Cette création fut d’un secours considérable pour l’unité du peuple tchèque reposant tout à la fois sur la communauté de langue, de sang, de tradition et de civilisation.
Après la conservation de leur langue, la plus grande préoccupation des Tchèques a êté de garder leurs coutumes, leurs traditions et surtout leurs costumes nationaux. « Qui change de costume, peut changer d’âme », dit un proverbe slave. Contre le danger de germanisation qui les menaçait, ils ont toujours considéré la sauvegarde de ces éléments linguistiques, ethnographiques et traditionalistes comme le palladium de l’instinct de leur race. Les Tchèques se distinguent par des costumes extrêmement curieux et pittoresques, ainsi que jai pu en juger dans le très riche musée d’ethnographie tchéco-slave, merveilleusement installé à Prague dans le jardin Kinsky. Pour les bien apprécier, il faut non seulement les voir dans un musée, dans des promenades, un jour de marché, dans les villages (1), mais encore et surtout les jours de fête. Invités à des fêtes données à l’occasion de l'Exposition de Prague, en 1908, Mne Jeanne et M. Frédéric-Régamey ont eu la bonne fortune d’en voir un très grand nombre réunis, et d'assister à des danses locales; je ne puis mieux faire que de leur emprunter leur suggestive description (2).«Les costumes sont extrémement pittoresques, aux couleurs éclatantes. Les rouges et les verts très vifs dominent. Vus de près, ils ne sont pas tous jolis. Les manches empesées des
(1) Il existe, à Prague, un magasin nommé « ZAp RU HA », organisé par l’Association pour PEncouragement de l’ Industrie populaire artistique. Cette association vend, à prix coûtant, en vue de la persistance de l’ethnographie nationale, des costumes, des broderies et des travaux villageois extréèmement intéressants et pittoresques.
(2) Nos Frères de Bohême. Paris, 1908, p.143.
L’'AUTRICHE 4