La Révolution française (1789-1815)
— 151 —
en dehors du Comité de Salut public, présidait aux finances.
On a trouvé dans cette opération, la plus colossale qui ait jamais été accomplie, surtout dans un temps si court, bien des imperfections. Je dirai alors avec Joseph de Maistre : « L'histoire n’est pas faite pour les myopes. » L'on à même prétendu encore, par une théorie puérile, que, si l’armée fut admirable, le gouvernement fut inepte; comme si ce n'était pas le gouvernement qui forme l’armée. Et l'on peut constater, en effet, que les oscillations gouvernementales retentirent toujours sur l’activité militaire, tant ces deux éléments sont intimement solidaires. Le gouvernement sut utiliser, pour un armement de telles masses, qui paraissait d’abord impossible, tout ce que le dix-huitième siècle avait produit de progrès scientifiques ; il y fit concourir des hommes spéciaux et patriotes, que l'Encyclopédie avait élevés. Cela n’a rien d'étonnant, quand on songe que des savants tels que Monge, GuitonMorveau, Meunier étaient liés au mouvement révolutionnaire et que Carnot et Prieur de la Côte-d'Or, initiés à la plus haute culture scientifique, siégeaient au Comité de Salut public.
Mais ce n’est pas tout. La Convention nationale, héritière des grandes traditions de la monarchie française, Les conservant et les perfectionnant, maintint ce que celle-ci avait toujours pratiqué : la subordination du pouvoir militaire au pouvoir civil; c’est la condition même d'existence de toute patrie. Il y aurait outre cela des considérations diverses, que je n'ai pas à faire valoir, pour compléter ce théorème sociologique, mais je n’insiste pas ; car il est évident que l’activité militaire doit toujours être subordonnée au système général de la politique extérieure, qu'elle doit servir. Du reste, le peuple romain, ce grand peuple conquérant, pratiqua toujours cette grande maxime, et le Sénat romain préparait et complétait toujours par la diplomatie l’activité militaire ; il préférait même celle-là, quand c'était possible, au hasard des combats.
Le système général de la guerre que la France soutenait fut aussi vaste que simple et sage, et honore le gouvernement qui l'a construit. Il consistait, après avoir incorporé préalablement la Savoie et Nice, ce qui fut fait en 1792, à faire sur les Alpes et les Apennins, surtout une guerre défensive ; sauf la tentative conçue par Danton, et qui échoua, de conquérir la