La Révolution française et ses détracteurs d'aujourd'hui

28 LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

dre tous les citoyens égaux devant l'impôt, remettre la bourse des contribuables aux mains de leurs représentants, telle était la double opération qu'il fallait exécuter en 1789, et les privilégiés, comme le roi, s’y prêtaient sans résistance (1). »

Une parenthèse, d’abord. Où Taine avait-il découvert que le haut clergé, la noblesse et le roi, « se prétaient sans résistance » à la double réforme qui, selon lui, eût suffi ? Dans la déclaration royale du 23 juin 1789, assure-t-il. Mais quoi ! avait-il oublié — ou feignait-il d'ignorer, pour tromper le lecteur, — que cette déclaration, par laquelle Louis XVI, mal conseillé, essaya d’intimider le Tiers, était : 1° un acte d'accusation contre les États généraux, auxquels Louis XVI reprochait de n’avoir encore rien fait (comme si la faute n’en avait pas été tout entière à la cour, à la noblesse, aux prélats) ; et 2° une suite de coups d'autorité royaux, cassant les arrêtés pris par le Tiers le 17 juin (2), prescrivant le maintien des ordres, déterminant les bornes du droit de réforme des États, ne permettant qu'à la noblesse et au clergé de s'occuper de leurs « prérogatives honorifiques » et de traiter les questions relatives aux « propriétés féodales et seigneuriales », prétendant même sauver d'avance presque tout le vieux système féodal, « les dimes, cens, rentes,

(1) La Révolution, t. I, p.180.

(2) Le 17 juin, le Tiers, las d'attendre les deux autres

ordres, s'était constitué en Assemblée Nationale et avait pris, en vertu de ce titre, des arrêtés relatifs aux impôts.