Le drapeau du 27e régiment d'infanterie

SÉBASTOPOL 63

magasin à poudre situé presque au milieu de nos troupes, et une explosion terrible eut lieu, ensevelissant sous les décombres quelques hommes de notre droite, etla plupart des blessés réfugiés dans les trous de loup; mais aucun soldat du 27° ne quitta son poste, et le feu continua sans interruption. Des deux côtés, les hommes et les officiers tombaient à peu près en nombre égal. C'est à ce moment que le colonel Adam, alors même qu'il témoignait aux officiers sa satisfaction de l’héroïque conduite du régiment, fut frappé d’une balle en plein cœur, et tomba glorieusement à sontour (1). Mais un pareil carnage ne pouvait durer plus longtemps; à cinq heures, les débris des colonnes russes, brülant avec rage leurs dernières cartouches, recevaient l'ordre de battre en retraite sur les défenses intérieures de Sébastopol (2).

Mais le feu d'artillerie n’en continua pas moins, très vif de la part de l'ennemi. Pendant une accalmie, vers septheures, le génie se hâta de créer des communications directes par le saillant du bastion, de réparer le parapet de la gorge, et de fermer l'entrée des poudrières du côté de la place, pendant que l'artillerie enclouait

(1) Charles-Joseph Adam, né à Nancy en 1812, soldat au 20° Léger en 4831, gagna ses galons de caporal l’année suivante à la campagne de Belgique. Puis il passa en Afrique, où il devait servir pendant vingt années consécutives. Sergent au 3° Bataillon d'Afrique en 1833, adjudant en 4836, il fut nommé sous-lieutenant quelques mois après, reçut une grave blessure à l'assaut de Constantine (1837) et fut fait l'année suivante chevalier de la Légion d’honneur. Lieutenant en 1840, capitaine en 1842, chef de bataillon en 1848, lieutenant-colonel du 2° Régiment Etranger en 1851 puis du 52° de Ligne en 1852, le ministre mit à profit sa grande connaissance de l'Orient dès le début de la guerre contre la Russie, en lui confiant une mission en Turquie. Nommé en même temps colonel du 16° Léger et gouverneur de Gallipoli (1 mai 1854) il fut dans la même année promu officier de la Légion d'Honneur. Colonel du 27° de Ligne le 18 janvier suivant, blessé le 16 juillet 1855, tué à l’ennemi le 8 septembre.

(2) C’est alors seulement qu'on put se compter : dans celte journée, une des plus sanglantes de son histoire, le 27% de Ligne avait eu 30 officiers mis hors de combat ; et ses pertes totales s’élevaient, pour ces cinq heures de combat, à 29 tués et 419 blessés.