Les états généraux en France

LES ÉTATS GÉNÉRAUX EN FRANCE. 899

tions, ceux qu’on chasse ou qui, par dégoût, se retirent de la vie politique, laissent la place à une nouvelle génération d'intrigants, riches seulement en appélits, pauvres de savoir et de caractère, et dont il va falloir que le pays fasse encore une fois l’apprentissage et paye chèrement l'éducation.

Tout autre est la tradition anglaise. Ce n’est pas seulement au lendemain de la bataille de Culloden, et lorsque la cause des Stuarts est irrévocablement perdue, qu’on voit les derniers amis des Sluarts perdre aussi leurs dernières illusions, mais non donner leur'démission : alors, les Jacobites se font tories, et comme tels, ils gardent leur influence, ils continuent à jouer leur rôle dans les affaires du pays. Telle est aussi, en Angleterre, l'habitude constante et la règle, que, vainqueurs ou vaincus, jamais ni whigs, ni tories ne perdent courage : vainqueurs, ils savent qu’un jour viendra, où ils seront vaincus; vaincus, ils travaillent à prendre leur revanche, et à la prendre toujours par les moyens constitutionnels et légaux

L'Angleterre, qui n’a pas, au point de vue de la forme du gouvernement et des compétilions dynastiques, les divisions dont nous souffrons, n’a pas non plus les infirmités qui en sont la .conséquence. Elle a deux grands partis, nationaux tous deux, l’un plus conservateur que l'autre, l’autre porté surtout aux réformes, mais dont ni l’un ni l’autre n’altend rien d’une révolution. Sous un gouvernement accepté de tous, incontesté et immuable, ce n'est vrai ment pas, comme on le dit par esprit de critique, une lutte de portefeuilles qui se poursuit, c’est une lutte d'idées. La couronne reste inattaquée; seulement les ministres changent, non pas tel ministre en particulier, parce qu'il a déplu au roi ou à la reine, mais le ministère tout entier, parce que son programme a cessé d'obtenir la majorité dans les Chambres. Suivant qu’il trouve que l’heure est venue de marcher ou bien d’enrayer, le Parlement appelle au pouvoir whigs ou tories. La couronne s'y prêle toujours, et toujours elle est là pour servir de frein. Le nouveau ministère amène avec lui son personnel tout formé, son «relais, » comme on dit. Celui-ci se compose, non, comme chez nous, des premiers venus, auxquels le hasard d’une amitié de salon, de coulisse ou d’estaminet, subitement portée au pouvoir, permet de dispenser des faveurs, mais d'hommes sérieux, instruits, préparés, parmi lesquels, s’il: s’en trouve qui n’aient pas encore l’expérience pratique des affaires, il n’en est point auxquels manque l'étude préalable des décisions qu’ils auront à prendre, des lois qu’ils devront faire ou appliquer.

Dans ces conditions-là, un peuple est libre, sans cesser pour cela d’être tranquille; surtout si, comme en Angleterre, il a pris soin de