Les idées du Comte de Maistre sur l'éducation des femmes : discours prononcé dans la Société des Conférences de la Palombelle, au college romain

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équitable, on se contente de le traiter de paradoxal écrivain, d'irréconciliable adversaire des idées modernes, ou de répéter un mot sonore de M. de Lamartine, en l’appelant, ce qui d’ailleurs ne signifie rien, prophète du passé.

Certes, qu'il y ait, dans les écrits de M. de Maistre, une forte part de paradoxe; qu’il se soit amusé souvent, trop souvent peut-être, à surabonder dans son propre sens, à exagérer sa pensée pour provoquer ses contradicteurs ; que, sur beaucoup de points, et des plus graves, il ait cherché, suivant ses propres paroles, à redresser l'opinion en la traitant comme on traite les arbres qui se courbent et qu’on tire avec force dans le sens opposé; je me garderai bien d'y contredire. Ce serait commettre soi-même un paradoxe fort étrange que d'affirmer que M. de Maistre n'ait jamais manqué de mesure; et il suffit de parcourir les plus célèbres de ses livres pour reconnaître qu'il n’a que trop fréquemment observé la règle qu’il donnait, dans une de ses lettres, sous une forme vive et pittoresque dont on voudra bien, je l'espère, excuser l’excessive familiarité: « Il en faut » — disait-il de l’impertmence — «il en faut dans certains ou« vrages comme du poivre dans les ragoûts ».

Toutefois, ce dont il est, je crois, très permis de douter, c’est que ce soit dans cette partie paradoxale et contestable de l’œuvre de Maistre qu'il faille chercher l’expression exacte et, je dirais, le fond même de sa pensée. Il faut nous le représenter dans ce qu’il appelle sa solitude de Chambéry ou dans ses glaces de Pétersbourg, avec son tempérament ardent et ba-