Les idées du Comte de Maistre sur l'éducation des femmes : discours prononcé dans la Société des Conférences de la Palombelle, au college romain
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tailleur, avec l'autorité que lui donnent son inépuisable mémoire et ses immenses lectures, avec cette surabondance d'idées dont il se plaint quelque part comme d'un défaut. Il s'éveille de grand matin, alerte, dispos, prêt à la lutte. en fureur de vérité, comme dit Sainte-Beuve. Il se met à sa table de travail. Il prend la plume. Les pensées se pressent et se précipitent. Joignez à cela son éloquence naturelle, une sorte de chaleur oratoire qui l'emporte et le fait fondre sans merei sur son adversaire. Alors jaillissent ces morceaux célèbres que tout le monde a lus et sur lesquels d'ordinaire, et bien à tort, on le juge: le terrible passage des Soirées de Saint Pétersbourg sur le bourreau, le fameux portrait de Voltaire, tout le livre de l’Æglise Gallicane où il prend à partie Pascal et Bossuet, et ce long examen de la philosophie du chancelier Bacon, du lord Verulam, dont il disait lui-même avec cette familiarité enjouée qui lui est propre: « Nous avons boxé comme « deux forts de Fleet Street; et, s'il m'a arraché «quelques cheveux, je pense bien aussi que sa per<ruque n’est plus à sa place ». M. de Maistre, en effet, a beaucoup bowé dans ses livres.
Mais, — on l'a dit déjà très souvent, et rien n’est plus vrai, — l’homme qui écrit se montre dans ses livres tel qu’il voudrait être ou tel qu'il croit être. C'est seulement dans ses lettres qu'on le voit réellement tel qu’il est. Or, il faut bien le reconnaitre, les lettres de Joseph de Maistre nous donnent une impression toute différente de celle de ses ouvrages, et le Mastre de convention, le Maistre de légende que