Lettres inédites de Frédéric Gentz à sir Francis d'Ivernois (1798-1803)
sans vous. C’est une obligation éternelle que vous m’avez imposée.
Le morceau sur les finances de la France qui termine mon cahier de septembre est fait, comme vous pouviez bien le supposer, dans les principes qui nous sont communs. J'espère que vous en serez content. J’ai dit à la fin de ce morceau « que, si la République devait être sauvée, elle ne le serait ni par ses ressources ordinaires, ni par ses ressources extraordinaires ». J'ai ajouté que malgré cela « il y avait des moyens de la sauver sur lesquels je garderai le silence ». Je n’osais pas en dire davantage, mais vous ne vous méprendrez pas sur ce que j'en pense. Les moyens dont je ne parle pas, et que j'ai voulu indiquer par ce peu de mots, sont tous renfermés dans un seul : c’est la mauvaise conduite des puissances appelées par la Providence à rappeler l’ordre dans les relations sociales. Cest l'inactivité, c'est la neutralité coupable de quelques-unes de ces puissances : c’est la division, c’est l'intérêt personnel et la politique astucieuse de quelques autres. Nous savons déjà ce que l’inertie des premières a coûté à l’Europe ; et quand on voit l'expédition contre la Hollande, tentée, peut-être consommée sans l'intervention de la Prusse, on meurt de honte de porter le nom de Prussien. — Quant à la coalition, je tremble quand je pense au moment où ils mettront le pied sur le territoire français. Il n’y a absolument que l'Angleterre qui m’inspire une confiance absolue. Pour l'Empereur de Russie, je ne doute point de sa bonne foi; mais je crains son caractère indomptable, et surtout sujet à toutes les impressions du moment. Mais le Cabinet de Vienne — quoique chez nous je me garderais bien de faire cet aveu, peu compatible avec mon désir ardent de le voir uni avec notre cour de cœur et d'âme, je vous le dis dans amertume secrète de mon sentiment intérieur, je le crains dans ses victoires comme je l'ai craint dans ses revers. Je crains que la contre-révolution ne soit encore trop loin de nous |
J'ai reçu la lettre que m’a apportée Msr. Pozzo de Borgo’,
1. De quelle puissance ce Corse était-il alors l'agent ?