Mirabeau

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lats et les communes par leurs consuls), et sur la nécessité de convoquer une assemblée générale des ordres de la Provence. Puis, comme on l’accusait d'être venu rompre par une motion incendiaire un accord juré, il répondit aux privilégiés par un nouvel écrit où le tribun du peuple éclate déjà avec toute l’éloquence qu’il fera bientôt retentir du haut de la tribune de l’Assemblée nationale.

« Dans tous les pays, s’écriait-il, dans tous les âges, les » aristocrates ont implacablement poursuivi les amis du » peuple ; et si, par je ne sais quelle combinaison de la » fortune, il s’en est élevé quelqu'un dans leur sein, C’est » celui-là surtout qu'ils ont frappé, avides qu’ils étaient » d'inspirer la terreur par le choix de la victime. Ainsi » périt le dernier des Gracques de la main des patriciens ; » mais, atteint du coup mortel, il lança de la poussière vers » le ciel, en attestant les dieux vengeurs ; et de cette pous» sière naquit Marius, Marius, moins grand pour avoir » exterminé les Cimbres que pour avoir abattu dans Rome » l'aristocratie de la noblesse.

» Pour moi, qui dans ma carrière publique n'ai jamais » craint que d’avoir tort ; moi qui, enveloppé de ma cons» cience et armé de principes, braverais l’univers : soit que » mes travaux et ma voix vous soutiennent dans l’Assem» blée nationale, soit que mes vœux seuls vous y accompa- . » gnent, de vaines clameurs, des protestations injurieuses, » des menaces ardentes, toutes les convulsions, en un » mot, des préjugés expirants, ne m'en imposeront pas. » Eh ! comment s’arréterait-il aujourd’hui dans sa course » civique celui qui, le premier d’entre les Français, à pro» fessé hautement ses opinions sur les affaires nationales » dans un temps où les circonstances étaient bien moins » urgentes et la tâche bien plus périlleuse? Non, les ou» trages ne lasseront pas ma constance ; j'ai été, je suis, je » serai jusqu’au tombeau l'homme de la liberté publique,