Oeuvres diverses

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Voilà la mesure de l'estime et de la reconnaissance vouées au peuple par les hauts personnages auxquels il apporte infatigablement son suffrage et son amour.

Dans ces cerveaux desséchés, sous ces froides poitrines. il n’est même plus de place pour le respect des morts. A peine sont refroidis les glorieux prolétaires qui ont jeté la couronne à une poignée de nains, et déjà ces mvyrmidons gonflés repoussent du pied linstrument inutile, veulent anéantir au plus vite la preuve de leur origine, enfouir au plus profond de la terre ces témoins d’une dette qu’ils sont résolus à laisser protester.

Malheureusement pour cette mesure, toute de concorde sans doute, le délégué Drevet défend les cadavres du peuple contre ces oiseaux de proie de la réaction. Discours, prières, menaces, rien n'émeut cet indocile.

On est forcé d'appeler Gannal. Qu'importe! Les dictateurs conduiront en plein soleil, en grande pompe, les corps qu'ils eussent voulu jeter la nuit à la fosse, et le même Garnier, se faisant un tremplin de leur cercueil, débitera sur leurs ossements la plus attendrie des oraisons funèbres. L’écureuil se rattrape toujours à quelque branche, et s’il tombe, c’est sur ses pieds.

« Délégué du peuple, déclare Drevet, je m’opposai

« à l'inhumation nocturne, attendu que ces citoyens « étaient morts pour la liberté, ce qui méritait bien « quelque honneur funèbre, et qu’en outre n'étant pas « reconnus, les veuves et les orphelins qu'ils laissaient, « seraient privés des pensions que leur devait la Répu« blique, et je donnai ordre aux citoyens préposés à la « garde des morts, de veiller à ce que nulle personne n’approchât des cadavres. »

De pareils compagnons gênaient les dictateurs provisoires ; aussi n’eurent-ils de repos qu'après les avoir chassés à force d’humiliations et de mépris.

A l'égard de Drevet, la haine des séides de Garnier